Une première édition de cette étude - tirée à cent exemplaires remis à l'auteur- avait été publiée en 1889 par les soins de l'Union artistique du Nord. Ce tirage de travail se présentait sous la forme d'une brochure in-12 de 89 pp., éditée chez l'éditeur lillois Danel.

Il s'agit ici d'un exemplaire de la nouvelle édition illustrée et de luxe réservée aux amateurs. Celle-ci avait été "soigneusement revue" et même augmentée. Son tirage fut limité à deux-cents exemplaires numérotés.

Avec cette monographie de Louis Watteau (1731-1798) et de son fils François (1758-1823), dits Watteau de Lille alors qu'ils sont nés tous deux à Valenciennes comme le "Grand Watteau", Paul Marmottan (1856-1932) s'inscrit, à la suite de Philippe de Chennevières, dans ce mouvement de redécouverte d'artistes provinciaux qui avaient sombré dans l'oubli.

Il s'agit en l'occurence de la transcription d'une conférence donnée au palais Rameau à Lille, le 16 mai 1889, dans le cadre de l'Union artistique du Nord. Cette conférence faisait suite à une importante exposition Watteau organisée à Lille par les soins de la dite société. Cette dernière "présentait au public un panorama de soixante-dix tableaux et de cent-quarante dessins environ des deux artistes lillois ainsi que quelques gravures d'après Antoine Watteau. Une majorité d'oeuvres avaient été prêtées par la famille Lenglart. Elles avaient été acquises pour la plupart du vivant de Louis et François Watteau par Charles Lenglart (1740-1816), qui s'était fait leur mécène. La collection de ce dernier a, par la suite, été dispersé entre les multiples branches de sa descendance ainsi que lors de trois ventes principales (1879, 1902 et 1909)." (Gaëtane Maës, Les Watteau de Lille, Arthéna, 1998) 

La monographie de Marmottan constitue la première étude d'ensemble de la carrière et de l'oeuvre peint des deux artistes. Gaëtane Maës a rappelé l'apport essentiel de l'ouvrage pour la connaissance des Watteau : "L'auteur avait alors accès à des collections particulières aujourd'hui dispersées, ce qui lui a permis de décrire des oeuvres qui ne sont plus localisées aujourd'hui. Cette analyse de l'oeuvre des Watteau de Lille demeure primordiale malgré l'emphase de certains paragraphes critiques. " La rhétorique parfois solennelle du redécouvreur qui exhume un passé "injustement" oublié ("Que d'artistes du passé, que d'hommes de valeur dans tous les genres attendent encore leur réhabilitation aujourd'hui! Pour des raisons diverses, indépendantes de la volonté des bons esprits, un historien seulement leur a manqué jusque là (...) Mais l'heure de la justice sonne enfin et l'historien espéré apparaît") ne doit pas faire oublier le charme de cette évocation sensible de deux "petits maîtres" qui furent les "peintres d'une époque, d'une époque marquée par eux au coin du vrai caractère qu'elle a revêtu". Plus avant, cette monographie s'inscrit dans l'ensemble des premiers écrits de Paul Marmottan, qui privilégiaient l'étude historique du Nord. 

Dans son guide analytique de la bibliothèque Marmottan, rédigé en 1938, Fleuriot de Langle était revenu sur cette curiosité septentrionale précoce : en "1886 (...), il sème dans la revue des Amis des Monuments maints articles qui dissertent, l'un, du Beffroi de Bergues, l'autre du rétable de Jean de Bellegambe à Douai, un troisième des sculptures de la Cathédrale d'Amiens. En 1887 (...,) Il brosse un Tableau de Valenciennes au XVIIIe siècle ; il s'occupe des peintures de Saint-Omer, depuis le Moyen-Age jusqu'à nos jours. En 1888-1889, il édite les Ephémérides Valenciennoises de son compatriote A. Dinaux, image du "curieux", parmi lesquels se range "toute âme bien née" qu'habite "le légitime désir de s'améliorer en agrandissant les limites du savoir." "En guise de prélude à des chants moins particuliers, poursuit Fleuriot, Marmottan dévoue ses loisirs à une Notice historique et critique sur Louis et François Watteau, dits Watteau de Lille, parue en 1889 dans l'Union artistique du Nord (...)".