Cette brochure consacrée au chansonnier picard  Emmanuel Bourgeois (1826-1877) est l'oeuvre de Maurice Garet, qui tenait la fonction d'archiviste au Comité des "Rosati picards (Tradition - Art - Littérature)". A l'instar du "Caveau lillois" (1905), cette société fondée en 1894 à Amiens entendait redonner ses lettres de noblesses au Picard, l'une de ces langues régionales que rejetait l'école de la Troisième République . Cette biographie, la première jamais écrite sur Bourgeois, s'inscrit dans ce contexte local de relégitimation culturelle des langues dialectales : elle a donc fort logiquement été publiée dans la collection "La Picardie littéraire, historique & traditionniste", revue régionaliste illustrée, dont les bureaux se trouvaient à Cayeux-sur-Mer et à Amiens. E. Bourgeois est en quelque sorte à Amiens ce que fut le chansonnier Alexandre Desrousseaux à Lille.
L'inauguration d'une plaque de rue au faubourg de Montières, en 1903, "où se lira désormais le nom d'Emmanuel Bourgeois", est à l'origine de cette publication qui reprenait en grande partie une conférence prononcée par l'auteur aux Rosati picards, le 4 juin 1897.
"Emmanuel Bourgeois", écrit l'auteur, "avait su, en effet, conserver, sans le défigurer dans ses écrits, le parler vrai de son village, et ce d'autant mieux que son manque d'éducation première ne lui permettait guère de le polir beaucoup, ni de le rendre plus académiquement élégant. Ajoutons même que, dans ces chansons et anecdotes en prose, on trouve une façon d'écrire le picard qui pêche un peu trop par l'absence d'orthographe. [...] Que dirons-nous de son oeuvre? Simplement qu'elle est celle d'un vrai chansonnier, c'est-à-dire peu littéraire. Les couplets d'Emmanuel Bourgeois doivent être chantés ou dits avec un accent bien picard ; ils ne doivent pas être lus."
Bourgeois fut enterré dans le petit cimetière de Vers, à proximité d'Amiens. "Là, [...], on trouve parmi la verdure des allées et la floraison d'une haie touffue, une simple pierre rectangulaire où se lit le nom du chansonnier modeste qu'un baptême de rue vient de glorifier."